LE CAPTAGON: Le “Roi du Monde”

Publié le par Yakadha

En juin dernier, le djihadiste Seifeddine Rezgui tuait 39 personnes sur une plage de Sousse (Tunisie) avant de se faire abattre par la police.

L’autopsie de son corps révèlera la présence de Captagon, une drogue de synthèse consommée notamment dans les pays du Golfe : des quantités importantes de cette substance circulent depuis plusieurs années entre l’Arabie saoudite, le Liban et la Syrie et globalement dans la région, alors même que les principales usines de production se trouvent aujourd’hui dans des territoires contrôlés par Daesh.

Le Captagon accroît les performances des combattants, les rendant  insensibles à la fatigue, à la peur, augmente considérablement les performances sexuelles (c'est pourquoi les frères ont créé le djihad du sexe), et leur enlève toute forme d’empathie : Une drogue “idéale” pour faciliter la commission d’actes inhumains.

Lors des attentats du 13 novembre, des rescapés ont fourni une description des terroristes qui laisse penser qu’ils avaient pris du Captagon : regards fixes, visages livides, sans expression, ils ressemblaient à des “morts vivants”.

Des analyses médico-légales doivent permettre de dire si, comme à Sousse, les terroristes étaient effectivement drogués.

Nous allons essayer d’en savoir plus sur la prétendue drogue des djihadistes et faire la part des choses entre fantasme et réalité. 

  • Qu’est-ce que le captagon?

Synthétisé pour la première fois en 1961, le captagon est un stimulant de la famille des amphétamines  qui comprend de la métamphétamine et l'ecstasy (aussi appelé MDMA) connues pour leurs propriétés dopantes. Et  de la théophylline, substance contenue dans certains traitements contre l’asthme, c’est un alcaloïde comme la caféine, qui agit comme bronchodilatateur. (Mais associée aux amphétamines, la théophylline en augmente les effets).

Progressivement, le Captagon a montré des propriétés intéressantes en tant que stimulant aussi bien sur le plan intellectuel, pour les examens par exemple, que sur le plan physique, pour les sportifs ou ceux qui voudraient réaliser des exploits. 

En effet, à des doses modérées, le captagon stimule la production de dopamine et améliore la concentration, c'est pourquoi il a aussi, longtemps été prescrit dans le traitement contre la narcolepsie et l'hyperactivité.

Il a été interdit en France dans les années 70 à cause de nombreux effets secondaires pendant ou après la prise. Notamment des risques de crise cardiaque, de dépression, et bien sûr de pharmaco-dépendance.

Depuis 1986, la fénéthylline est d'ailleurs classée sur la liste des substances stupéfiantes placées sous contrôle international de l'Organisation mondiale de la santé.

Comme toutes les autres amphétamines, cette drogue entraîne une résistance à la fatigue, une vigilance accrue et une perte de jugement”.

 

  • Sous quelle forme est consommé le captagon ?

La captagon se prend généralement sous forme de pilule et peut aussi être administrée sous forme liquide en intraveineuse.

  •  Les effets  du captagon ?

Au niveau moléculaire, la fénéthylline pénètre dans les neurones et chasse les neurotransmetteurs présents dans les vésicules des synapses : la noradrénaline et la dopamine. La fénéthylline augmente également la libération de glucose.

Autrement dit : "Comme toutes les autres amphétamines, cette drogue entraîne une résistance à la fatigue, augmente la vigilance, la concentration, accélère le rythme cardiaque et réduit la sensation de fatigue (par la libération de noradrénaline). "C’est une drogue parfaitement adaptée au combat. La personne qui en consomme peut se sentir le "roi du monde" : résume le Pr Jean-Pol Tassin, neurobiologiste de l'Inserm et spécialiste des addictions.

En effet, le captagon désinhibe, active les circuits cérébraux de la récompense et du plaisir (par la libération de dopamine) et "permet d’augmenter la libération de glucose, un mécanisme biologique qui donne plus de puissance musculaire sans fournir d’effort".

Mais tous ces effets restent temporaires, l’action euphorisante du captagon dure en moyenne entre 60 et 90 minutes.

Les neurones doivent fabriquer de nouveau l'adrénaline et la dopamine sorties très rapidement de ses vésicules, et seul le repos le permet.

En l'absence de sommeil, c'est la "descente" : "les individus ressentent une fatigue intense, une psychose, des fonctions mentales altérées, l'alternance de phases d'euphorie et de dépression. C'est un peu comparable aux effets ‘’d'une nuit blanche sur le cerveau’’, précise le neurobiologiste.

Puis arrive une euphorie intense permettant de ne ressentir ni peur, ni douleur. Une arme redoutable face aux pressions : "On les frappait et ils ne ressentaient pas la douleur. La plupart d'entre eux rigolaient alors qu'on les bourrait de coups", témoigne un officier de la brigade des stupéfiants de Homs, en Syrie, interrogé par Reuters.

La dopamine libérée en grande quantité stimule le circuit cérébral de la récompense et du plaisir, menant à long terme à l’addiction.

Consommé en trop grande quantité, il peut provoquer un arrêt cardiaque.

 

  • Comment reconnaître une personne sous l’emprise du captagon ?

Les traits du visage changent sous l’effet de cette drogue.

Des signes peuvent permettre de reconnaître si elle est sous l’emprise de captagon. "La dilatation des pupilles, la crispation des mâchoires et le resserrement des narines sont autant de transformations physiques révélatrices d’une consommation de captagon", selon le neurobiologiste : le Pr Jean-Pol Tassin.

 

  • Commerce:

Malgré son interdiction notamment en France, le produit a continué sa vie dans les différents laboratoires clandestins, d’Europe puis du Moyen-Orient.

Le captagon serait devenu incontournable dans les rangs des combattants djihadistes syriens car il serait assez simple à fabriquer.

Les pilules sont ensuite transportées par bateau ou voiture de la Syrie vers le Liban et la Jordanie, et sont vendues entre 5 et 20 dollars l'unité ou mêmes échangées contre des armes.

D’après les chiffres de l’Organisation mondiale des douanes (OMD), la quantité de pilules saisies dans les pays de la péninsule arabique a fortement augmenté ces dernières années : plus de 11 tonnes de captagon en 2013, contre 4.

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